LE COUVENT DE KOENIGSHOFFEN

1- L'époque romaine :


l'un des nombreux exemples de poteries retrouvés sur les différentes fouilles à Strasbourg koenigshoffen.

L’activité artisanale de la cité civile s’étendait jusqu’aux abords de ce promontoire avancé vers le sud-ouest de la terrasse loessique sous-vosgienne. C’est sur cette petite bute que vont venir s’installer quelques siècles plus tard le Couvent des Chartreux, puis celui des Capucins. A proximité de ce site a été découvert la stèle d’un légionnaire de la VIIIème légion dont le camp était établi dans l’actuel centre ville. Il est certain que de nombreux artisans s’étaient établis le long de la route des Romains afin entre autre de subvenir aux besoins de l’armée romaine : des ateliers de poteries, de céramiques, de verreries, de maréchaux-ferrants, de forgerons, des commerçants... Des débris de tuiles et de briques dont certains estampillés au nom de la IIème légion sont retrouvés dans l’enceinte du couvent. Il y a été également découvert un autel dédié à Epona, déesse protectrice des animaux.

2- Les Chartreux :


    Moine Chartreux ; monument funéraire
    provenant de Molsheim

Mais l’Histoire proprement dite de ce site ne débute qu’avec l’apparition des Chartreux. L’ordre des Chartreux édicté par Saint-Bruno en 1084 repose sur une vie spirituelle intense des ermites et sur une organisation rigoureuse d’un monastère, alliant par jour 8 heures de sommeil, 8 heures de prière et 8 heures de travaux manuels. Les religieux vivent la plupart du temps dans leur cellule d’où ils ne sortent que pour se rendre à l’église. Ils doivent observer un silence perpétuel et cela, précisent les statuts, en tout lieu mais surtout à l’église, au chapitre, au réfectoire et dans le cloître. Le silence n’est rompu que les jours de chapitre, durant la récréation. Par leur extension à travers l’Europe entière, l’ordre comptait fin du XVème siècle plus de 600 monastères.

Arrivés en 1333 de la Grande Chartreuse de Grenoble, ils fondent leur Couvent aux environs de 1339, les textes ne citant pas les mêmes dates. Auparavant, ce promontoire portait le nom vulgaire de Heidenbuhl que les Chartreux ont vite modifié en Marienbuhl (Mont de Marie). Sans contrainte extèrieure, protégé par le Roi de France François Ier qui lui permet de surmonter les difficultés dues aux guerres de religions, le Couvent peut alors prospérer et, en deux siècles, devenir riche et puissant. Les moines se dotent d’une splendide bibliothèque d’abord par leur travail de copieur, puis grâce à l’imprimerie importée de l’île Gutemberg à deux kilomètres de là ; ils cultivent des plantes nouvelles et contribuent à faire connaître les différentes espèces et propriétés des plantes médicinales et aromatiques ; ils contribuent à l’envoie de nombreux moines dans de nouvelles Chartreuses comme celles de Bâle, l’Hildesheim.


Groupe de la Nativité provenant de la Chartreuse de Strasbourg, vers 1475.
Noyer polychrome.
Strasbourg, Musée de l'Oeuvre Notre-Dame

En 1525, la Ville était officiellement passée à la Réforme qui conduit à la suppression de la moitié des Couvents du centre ville, épargnant encore le Couvent de Koenigshoffen. Cependant, en raison des troubles de l’époque, il crut bon de se placer sous la protection de la Ville. Mal lui en a pris car la Ville lui interdit désormais le recrutement de nouveaux religieux et condamne ainsi la Chartreuse à l’asphyxie. Les moines, se rendant bien compte de la situation, essayent de vendre les lieux pour s’installer ailleurs ; en vain. Le 8 août 1591, alors qu’il ne reste plus que cinq moines, le Sénat de Strasbourg ordonne leur emprisonnement et la destruction des bâtiments, n’épargnant que quelques dépendances. Libérés dix mois plus tard, les moines vont mettre dix ans pour récupérer une partie seulement de leurs biens tandis qu’ils se réinstallent à Molsheim où ils vivent toujours. Il y existe aujourd'hui un musée qui reconstitue une cellule du Moyen Age et leur vie d’antan.

3- Le promontoire entre les deux occupations :
Le domaine de la « Karthaus », c’est sous ce nom que le domaine de l’ancienne Chartreuse est entré dans l’histoire moderne. Il ne restait debout, entre les vignes, vergers et champs que quelques dépendances, étables et hangars. De nombreux propriétaires se sont succédés sur le domaine durant trois siècles, parmi lesquels nous pouvons retenir une ou deux personnes. L’un des acquéreurs du XIX était la famille Gravelotte (famille de juge de paix à Strasbourg) qui l’avait loué à Clausing. Celui-ci y fonda la première brasserie de Koenigshoffen. C’est celle-ci que Gruber rachète avant de s’installer au centre ville.
En 1803, Kestner fonda deux manufactures de produits chimiques : l'une à Thann et l'autre sur le domaine de la Karthaus. Cependant, pour des raisons économiques, il doit vendre celle de Koenigshoffen. L’usine de Thann, par contre, existe toujours et est largement reconnue dans le monde de la chimie industrielle.

4- Le Couvent des Capucins :

Comme chacun sait, le Couvent des Capucins a fait suite au Couvent des Chartreux et ce, depuis plus d’un siècle. Le 22 décembre 1891, suite à de nombreux pourparlers, l’évêque de Strasbourg achète ce domaine et le cède aux Capucins qui l’avaient repéré lors de leurs multiples missions. Déjà, le 27 juin 1892, les deux premiers Capucins venant de Sigolsheim entrent dans le domaine de l'ancienne Chartreuse. La première pierre est posée le 24 avril 1894. Actuellement encore y vivent des moines.

Au début du siècle, les étangs appartenaient aux Capucins. Volontairement, ils n'excédaient pas les 80 cm de profondeur. Ainsi, l'eau gelait en hiver, permettant aux moines, non seulement d'apprendre à patiner au voisinage, mais aussi de confectionner les blocs de glace indispensables à la pérennité de leur cave prestigieuse.


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